Description
« J’aurai aimé avoir un pinceau angélique… pour façonner l’archange. »
Guido Reni dit Le Guide (1575-1642), peintre italien de l’Ecole de Bologne, 1635.
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Il serait commode de présenter du XVIIème siècle une image ou des images convenues : on décrirait alors « Le Siècle des Saints » en évoquant la piété séductrice de François de Sales, « Le Siècle de la Raison » en parlant du doute méthodique de Descartes, « Le Siècle de l’Etat Absolu » en retraçant l’action du Cardinal de Richelieu, « Le Siècle de Louis XIV » en suivant le Roi-Apollon en son temple du Soleil.
Le « Siècle Baroque » pourrait être illustré par les glissements de lumière et l’abandon aux sens de La Transverbération de Sainte Thérèse du Bernin… Quant au « Siècle Classique », il serait éclairé par les vibrations lumineuses et le stoïcisme méditatif d’un paysage de Poussin… Des correspondances entre ces images naîtraient « le » tableau d’un « Grand Siècle » !
Tentons de nous approcher d’un homme contemporain du XVIIème siècle pour percevoir un monde qui fut le sien.
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« Grand Siècle », « Siglo de Oro », « Gouden Eeuw »
Au cours du XVIIème siècle, les bouleversements politiques et sociaux secouent l’Europe et modifient l’équilibre des forces : les puissances traditionnelles comme l’Espagne et les Etats italiens sont progressivement supplantées par de nouvelles nations. Les guerres de conquêtes s’engagent sur le continent européen puis dans le Nouveau Monde.
Le XVIIème siècle est riche de contradictions et de surprises ; tandis que les arts décoratifs consacrent le triomphe du baroque, les sciences se dotent de méthodes rationnelles. Tandis que s’intensifie la circulation des idées et des artistes, la constitution de grandes écoles nationales – les Provinces-Unies de Rembrandt ou l’Espagne de Vélasquez – favorise l’uniformisation des styles dans toute l’Europe. Les plus grands maîtres, Le Caravage, Bernin, Poussin ou Rubens, imposent leurs modèles aux artistes du continent.
Jusqu’au milieu du XVIIIème siècle, la peinture continue d’hésiter entre le clair-obscur et l’éclat lumineux des grands décors baroques. Alors que le château et les jardins de Versailles offrent aux princes d’Europe un modèle souvent imité. Quant à l’architecture, elle privilégie tantôt la fantaisie audacieuse, tantôt le retour aux canons de l’Antiquité classique.
Rome, l’Eglise Triomphante
S’il existe une ville et une cour qui confèrent une unité à l’époque baroque, c’est bien Rome. A travers le culte de l’antique et l’essor d’un art alternant entre manifestations baroques et classiques – beauté idéale, beauté moderne – la cité italienne réussit à trouver un langage commun exporté dans le reste de l’Europe.
Cette nouvelle expression artistique s’accorde avec l’histoire religieuse ; dès le milieu du XVIème siècle, l’Eglise catholique tente de recoudre la « robe déchirée du Christ » contre toutes les hérésies ; elle doit réaffirmer son autorité face à la diffusion des idées protestantes de Luther et de Calvin, apostolat désigné sous le nom de Contre-Réforme.
Le vigoureux baroque apparaît ainsi à Rome et se répand dans les pays catholiques européens en raison de son lien étroit avec la Réforme protestante. Son horizon est celui d’une chrétienté sans limite, qui renvoie indistinctement à une communauté de croyances, à l’assemblée des fidèles, à l’unité d’un espace – celui d’une étendue terrestre offerte à la bénédiction divine et destinée à se dilater jusqu’aux extrémités du monde créé et connu.
La conversion de l’univers à la foi unique, catholique : voici la mission assignée au baroque italien, dépositaire du principe d’universalité chrétienne, défenseur de l’unité de la croyance au nom du peuple de Dieu.
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Ecole Française du XVIIème siècle
A la fin du XVIème siècle, le maniériste devient quelque peu sans vie et forcé. Alors que les artistes s’attachent davantage au brillant qu’à l’authenticité du sentiment, le baroque marque le retour à la grandeur et à la virtuosité. Il emprunte néanmoins au maniérisme l’intensité des émotions et le sens du mouvement ; il revêt également la franchise de la Haute Renaissance pour donner naissance à un style frais et dynamique.
Entre-temps, la France devient le pays le plus puissant d’Europe et elle commence à disputer la primauté des arts visuels à l’Italie. Certains aspects dynamiques du baroque italien sont introduits en France, même s’ils sont atténués par la dignité classique qui imprègne une grande partie de l’art français.
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Les deux peintres français les plus illustres, Claude Lorrain (1600-1682) et Nicolas Poussin (1594-1665), travaillent essentiellement à Rome. Ils exercent une forte influence sur l’art français et ses écoles, en apportant un idéal d’élégance et de sobriété classique destiné à marquer en profondeur.
Les peintres français se rendent à Rome pour explorer le savoir-faire italien. Ils étudient l’art de l’Antiquité et de la Renaissance, puis ils retournent en France pour répandre la connaissance du baroque. Tandis qu’en Italie l’art baroque est essentiellement religieux, il est rendu magistral par Louis XIV qui le met au service de l’Etat français, plus précisément à la glorification de sa personne. En France, la sensibilité baroque apparaît sous sa forme la plus pure lorsqu’elle traite de la décoration des églises. Les riches matériaux, les retables spectaculaires, les fresques grandioses et les plafonds sensationnels s’accordent aux rites du culte catholique.
L’Archange Gabriel
Ange de l’annonciation, de la résurrection, de la clémence et de la mort, l’archange Gabriel est nommé « le messager » dans le Nouveau Testament. Son nom dérivé de l’hébreux « Gabar » signifie force et puissance divine.
L’archange Gabriel est l’un des 7 archanges considérés comme piliers de la création du monde. Il fait partie – avec les anges Michel et Raphaël – des 3 anges qui refusent de suivre Lucifer dans sa rébellion contre Dieu. Il est également choisi par Dieu pour être son messager auprès des hommes ; c’est l’ange Gabriel qui se révèle à Marie pour annoncer la naissance de Jésus-Christ par le Saint-Esprit. Ce porteur des plus grandes prophéties judéo-chrétiennes occupe une place particulière dans le monde céleste et angélique.
L’ange Gabriel apparaît également dans la religion musulmane sous le nom de Jibril. Il aurait cité à Mahomet les versets du Coran après lui être apparu dans un nuage de lumière. Les Musulmans voient en Jibril l’ange de la vérité qui porte le prophète au paradis.
Chez les Hébreux, l’archange Gabriel est une femme ; il serait le seul ange féminin de toute la hiérarchie angélique.
L’ange habite l’histoire des arts visuels. On rencontre ce messager ailé dans l’art grec, mésopotamien et étrusque, ce qui a probablement inspiré la culture artistique à venir, en particulier celle des Byzantins, des Romains et des Judéo-Chrétiens.
La première image chrétienne d’un ange se trouve dans le Cubicolo dell’ Annunziazione, dans la Catacombe de Priscille située dans le quartier de Trieste à Rome. Datée du milieu du IIIème siècle de notre ère, la représentation des anges sur les sarcophages et les reliquaires de cette période les montre sans aile.
L’Œuvre & Sa Composition
Cette toile s’inscrit dans la tradition du baroque « religieux » naît à Rome sous le pinceau du Caravage et d’Annibal Carrache. Alors que la religion fournit l’essentiel de l’inspiration artistique en Europe pour glorifier son pouvoir retrouvé face à la menace protestante, les portraits allégoriques, mythologiques, mystiques et les scènes de genre religieuses acquièrent une considération croissante pour les peintres de l’époque.
Le thème de l’annonciation largement parcouru à la Renaissance est abordé par la même grâce.
Sa sensibilité s’accorde avec l’expression de la ferveur religieuse. La lumière céleste, suave et soutenue à la fois, apporte relief et beauté au visage de l’ange Gabriel, tandis que les couleurs surnaturelles accentuent l’impact émotionnel désiré pour servir la passion spirituelle.
D’une posture maniériste, d’un naturalisme pur et d’une grandeur classique, la théâtralité de cette œuvre exprime la franchise émotionnelle convoitée par la peinture baroque. Elle révèle également l’équilibre serein de la peinture de la Haute Renaissance, par sa beauté, son harmonie et sa réussite technique.
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